Octobre 2011 : Pascale Sliwa

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Bonjour Pascale, vous avez grandi en Lozère, pourriez-vous nous parler de votre région d’origine et de votre parcours ? J’ai grandi au sein d’une grande famille et dans un tout petit village à la limite de la Lozère et de la Haute-Loire. Enfant, je suis allée à l’école locale avec une dizaine d’élèves avant de partir en pension à la ville dans un plus grand établissement. A 17 ans, mon bac scientifique en poche, je suis partie à la faculté de Montpellier pour faire un DEUG en sciences naturelles. Très vite, j’ai réalisé que la filière fac ne me convenait pas et j’ai décidé de passer les concours des écoles d’ingénieurs. C’est ainsi que j’ai été acceptée à l’ENSBANA (Ecole Nationale Supérieure de Biologie Appliquée à la Nutrition et à l’Alimentation) à Dijon. Ce choix a finalement été le début de mon expatriation, puisqu’après trois ans passés à Dijon, je suis partie à l’Université de Toronto faire un stage de recherche dans le département de « Chemical Engineering ».

Comment s’est passé votre premier séjour canadien ? Avec un autre collègue de promotion, je suis arrivée à Toronto en février 1993 pour une période de sept mois. Je me souviens que nous nous promenions dans le quartier financier, la tête en l’air pour admirer les gratte-ciels. Il faisait un froid de canard ! Avant le départ, nous avions pris contact avec un groupe qui s’appelait « Newcomers Network », les membres de ce groupe nous ont aidés à trouver un appartement et à nous intégrer. Je me souviens avoir été très impressionnée par la diversité culturelle, je parlais peu l’anglais à mon arrivée et ce melting-pot m’a beaucoup aidée : tout le monde parle avec un accent à Toronto.

Pourriez-vous nous dire quelques mots sur votre envie de revenir vous installer au Canada ? Fin août, je suis rentrée en France pour soutenir mon rapport de stage et obtenir mon diplôme et puis j’ai décidé coup sur coup de faire un DESS en administration des entreprises à Toulouse. Je n’avais que 22 ans et tout mon temps… Pendant mon année dans le sud-ouest de la France, je pensais déjà à mon retour au Canada car la France connaissait un fort taux de chômage. Et puis, il y avait une autre raison et non des moindres : j’étais tombée amoureuse d’un polonais à Toronto et mon cœur me disait d’y retourner. J’ai donc décidé d’entamer une procédure d’immigration pour le Canada et j’ai regagné Toronto en novembre 94 comme touriste en attendant mes papiers obtenus en février 95.

Quelles ont été les facilités/difficultés que vous avez rencontrées lors de vos premières années ? J’avais la chance d’avoir déjà un groupe d’amis et ils m’ont toujours encouragée et aidée. La plus grosse difficulté a été celle de trouver un travail et d’obtenir l’expérience canadienne nécessaire dans le domaine de l’agro-alimentaire. Cela m’a pris du temps. J’ai fait des petits boulots (baby-sitting, traductions, leçons de français…) avant de décrocher un poste dans une entreprise alimentaire à l’automne 95. Depuis, je suis restée dans ce domaine tout en changeant d’entreprise.

Vous travaillez donc depuis 15 ans dans l’agro-alimentaire. En quoi consiste votre travail ? Oui, plus précisément 14 ans dans la confiserie. I have a sweet job ! Au fil des ans, j’ai eu différents postes autour de l’assurance qualité et du développement de nouveaux produits. A l’heure actuelle, je fais du développement à plein temps, c’est-à-dire, que je prépare les recettes, les échantillons, je recherche les nouveaux ingrédients, j’expérimente avec de nouveaux arômes, de nouvelles textures, de nouvelles technologies. Je suis dans le sucre et les bonbons toute la journée. Je sens le bonbon quand je rentre à la maison.

Votre foyer est aujourd’hui multilingue. Pourriez-vous nous expliquer l’importance pour vous de maintenir la pratique de ces différentes langues ? Oui, mon foyer est multilingue (français, polonais, anglais). Mon mari a obtenu la nationalité française grâce à moi. Mes enfants vont dans une école publique francophone, et ils parlent « francopolonanglais » à la maison. Il est important de maintenir les trois langues afin que nos enfants puissent communiquer avec leur famille (cousins, grands parents, etc..) en France et en Pologne afin de maintenir le lien. Qui sait, peut-être voudront-ils retourner en Europe plus tard !?

Comment décririez-vous la vie à Toronto ? J’aime la vie multiculturelle de Toronto. J’habite au centre ville, au sud de l’Annexe et au nord de Kensington et c’est l’endroit idéal pour moi. C’est un quartier résidentiel et calme au cœur du centre ville au sein d’une communauté très active. Je n’aime pas me retrouver coincée dans la circulation sur les autoroutes de banlieue, j’essaye donc de garder mon travail en ville et de marcher ou d’utiliser mon vélo le plus souvent possible. Les enfants jouent dans la ruelle derrière la maison avec les autres enfants du voisinage. Nous adorons aussi la campagne et les grands parcs, et partons tous les étés faire du camping, canoë, randonnée, dans les parcs de l’Ontario ou plus loin.

Que représente le Canada pour vous ? Quels sont les liens que vous maintenez avec la France ? Le Canada, c’est chez moi depuis voilà 17 ans, j’ai ma maison, mon mari, mes deux enfants, mon travail, mes amis (canadiens, irlandais, américains, africains, polonais, etc…), mes loisirs favoris, une école francophone pour les enfants.
Mon mari et moi sommes les seuls expatriés de nos familles et il est donc très important de retourner dans nos pays respectifs. C’est pourquoi, nous allons en France régulièrement (presque tous les ans). Nous louons un gîte en Lozère pour une ou deux semaines où nous nous retrouvons tous. Mes enfants jouent avec leurs cousins et deviennent français de France pour un bref séjour. Nous retournons aussi régulièrement en Pologne pour maintenir les liens avec la grande famille polonaise.
Dans notre quotidien torontois, nous avons aussi gardé beaucoup de traditions culinaires françaises : les croissants, les pains au chocolat, le fromage, les baguettes, le bon vin…. Je dois dire que nous sommes assez gourmands. La France est très belle, j’aime ses paysages variés, escarpés, montagneux, ses vieilles maisons avec un long passé historique, les spécialités de chaque région…Je suis maintenant partie de France depuis 17 ans, je n’ai plus l’habitude d’y vivre. Si je devais y retourner pour m’y installer, je pense qu’il me faudrait un certain temps pour me réadapter… Comme immigrer à nouveau…

Pascale, merci !

Dernière modification : 06/10/2011

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